Introduction
Fixez votre mental sur quelque objet, soit à l’intérieur du corps, soit au dehors. Maintenez-l’y fermement pendant quelque temps. C’est de la concentration. Il vous faudra pratiquer cela tous les jours. Purifiez tout d’abord le mental par l’observance d’une conduite droite, et livrez-vous ensuite à la concentration ; celle-ci, sans cela, ne servirait de rien.
Il y a des occultistes qui font de la concentration alors que leur valeur morale laisse à désirer ; c’est pourquoi ils ne font aucun progrès spirituel.
Celui qui a une posture stable, qui a purifié ses nerfs et son enveloppe vitale en pratiquant constamment la maîtrise de la respiration, sera capable de se concentrer aisément. La concentration sera d’autant plus intense que vous aurez écarté toute distraction. Quelqu’un de vraiment chaste, ayant préservé son énergie, jouira d’une admirable concentration.
Certains aspirants impatients et sots se lancent d’emblée dans la concentration sans s’être préalablement soumis à un entraînement éthique. C’est une grave bévue. La perfection morale est un élément de suprême importance.
Vous pouvez vous concentrer intérieurement sur l’un quelconque des sept centres d’énergie spirituelle. L’attention joue un rôle prépondérant ; celui qui a développé ses pouvoirs d’attention aura une bonne concentration. L’homme rempli de passions et de désirs fantasques ne peut que difficilement se concentrer sur un sujet quelconque, fût-ce une seule seconde. Son mental bondit constamment comme un vieux singe.
L’homme de science, qui concentre son esprit et fait des inventions, perce les couches grossières du mental et, par la concentration, pénètre profondément dans les régions supérieures où il acquiert une science nouvelle. Il concentre en un seul foyer toutes ses énergies mentales qu’il projette sur les matières soumises à son analyse, et leur arrache leurs secrets.
Celui qui a développé sa force d’abstraction, qui consiste à retirer les sens de leurs objets, aura une bonne concentration.
Il vous faudra marcher pas à pas sur le sentier de la spiritualité. Posez d’abord les fondations d’une conduite droite, de la posture, de la régularisation du souffle et de l’abstraction. La superstructure (concentration et méditation) ne sera solide qu’à ce prix.
Vous devriez être à même de projeter à l’extérieur l’image, même absente, de l’objet de la concentration ; il vous faudra, à tout moment, évoquer cette image mentale ; cela peut se faire sans grande difficulté si vous avez une bonne concentration.
Au stade préliminaire de votre pratique vous pouvez vous concentrer sur le tic-tac d’une montre ou sur la flamme d’une bougie, ou encore sur tout autre objet agréable au mental. C’est la concentration concrète. Il n’y a pas concentration sans un objet sur quoi peut se poser le mental. Il faut que cet objet, au début, soit plaisant, car il est très difficile de maintenir la pensée sur quelque chose de désagréable.
Ceux qui pratiquent la concentration évoluent rapidement. Ils peuvent se livrer à tous travaux avec compétence et efficacité. Ce que d’autres font ou lisent en six heures, leur prendra une demi-heure. La concentration purifie et calme les émotions qui surgissent, fortifie le courant des pensées et clarifie les idées.
La concentration aide également l’homme dans son progrès matériel. Il aura un bon rendement à son bureau ou dans son entreprise. Ce qui, auparavant, était nébuleux devient clair et précis ; ce qui était difficile devient simple et ce qui, précédemment, paraissait complexe, étrange ou confus tombe facilement sous la prise du mental.
Vous pouvez parvenir à tout par la concentration ; à celui qui la pratique régulièrement rien n’est impossible ; il est en possession d’une claire vision mentale. Mais cela est difficile à qui a faim, ou à qui souffre d’une maladie aiguë.
La méditation est l’unique voie royale conduisant au salut, à la libération (moksha). Elle calme toute peine, toute souffrance, les trois espèces de fièvres (tapas) et les cinq sortes de chagrins (kleshas). La méditation confère la vision de l’unité et procure la notion de l’unicité. C’est un aéroplane qui permet à l’aspirant de prendre son essor vers le royaume de l’éternelle félicité, de la perdurable paix. Elle est l’échelle mystérieuse qui relie la terre au ciel et élève l’aspirant jusqu’à l’immortelle demeure de Brahman.
La méditation est l’écoulement continu de la pensée de Dieu ou de l’Atman, comme le filet d’huile coulant d’un vase dans un autre (taila-dhârâvat). Elle vient après la concentration.
Pratiquez la méditation aux premières heures du jour, de quatre heures à six heures du matin (brahma-muhûrta) ; c’est le meilleur moment pour cela.
Prenez une des postures recommandées (padma, siddha, ou sukha-âsana). Maintenez la tête, la nuque et le tronc en une ligne droite ; concentrez-vous sur l’espace entre les deux sourcils (trikûta) ou dans le cœur, les yeux étant fermés.
La méditation est de deux espèces : la méditation concrète (saguna dhyâna) et la méditation abstraite (nirguna dhyâna). Dans la première, l’aspirant médite sur la forme du Seigneur Krishna, de Râma, de Sîtâ, de Vishnou, de Shiva, de Gâyatrî ou de Devî. Dans l’autre, il médite sur son propre Moi, ou Atman.
Placez devant vous l’image de Hari (un des noms de Vishnou) avec ses quatre bras. Regardez-la fixement pendant cinq minutes, puis fermez les yeux et faites apparaître visuellement cette image. En même temps, dirigez votre mental sur les diverses parties de Vishnou. Voyez mentalement d’abord ses pieds, puis, dans l’ordre, ses jambes, son vêtement de soie jaune, son collier serti de gemmes (kaushtubha), sa boucle d’oreille (makara-kundala), ensuite son visage, sa tête couronnée, son disque (chakra) dans la main droite supérieure, sa conque (shankha) dans la main gauche supérieure, sa masse dans la main droite inférieure, puis le lotus dans sa main gauche inférieure. Revenez ensuite aux pieds et
recommencez à mainte reprise le même processus.
Finalement, fixez votre mental soit aux pieds soit au visage. Répétez mentalement le mantra : Hari OM, ou bien : OM Namo Nârâyana. Pensez aux attributs du Seigneur, tels qu’omnipotence, omniprésence, pureté, etc.
Méditez de tout votre cœur sur OM et sur sa signification. Cela se nomme « nirguna dhyâna ». Répétez OM mentalement. Identifiez-vous avec l’Atman. Éprouvez : « Je suis l’immortel et omnipénétrant Moi, ou Atman. Je suis Brahman, « Sat-Chit-Ananda » (pure existence, pure connaissance, pure béatitude). Je suis le silencieux témoin (sâkshin) des trois états et de toutes les modifications du mental. Je suis conscience pure ; je suis différent du corps, du mental, de l’énergie (prâna) et des sens. Je suis la Lumière des lumières, brillant par elle-même. Je suis la suprême Ame éternelle. »
Si vous ressentez de la satisfaction, de l’optimisme, de la patience, un apaisement mental ; si vous avez la voix adoucie, le corps léger ; si vous êtes sans crainte, ni désir, sans goût pour les choses de ce monde, pensez que vous faites des progrès dans le sentier spirituel et que vous vous approchez de Dieu.
O Prema ! II est un lieu où tu n’entendras aucun son où tu ne verras nulle couleur. Ce lieu s’appelle « séjour hors de toute peine » (parama dama, ou padam annamaya). C’est le royaume de la paix et de la félicité. Là, point de conscience physique ; le mental y trouve le repos. Tous les désirs, toutes les aspirations s’évanouissent. Les organes des sens (indriyas) restent tranquilles ; l’intellect cesse de fonctionner : plus de combats ni de querelles. Veux-tu rechercher cet asile paisible au moyen de la méditation silencieuse ? Un calme solennel y règne. Les grands sages (rishis) d’autrefois atteignirent ce lieu en fondant leur mental dans le silence. Brahman y brille de son propre rayonnement.
Oubliez le corps ; oubliez l’entourage. L’oubli est la plus haute des disciplines spirituelles (sâdhanâ). Il aide grandement à méditer ; il facilite l’approche de Dieu. Pensant à Dieu, vous oublierez toute chose.
Goûtez à l’état de conscience spirituelle en retirant votre mental des objets sensibles et en le fixant aux pieds de lotus du Seigneur, de ce Seigneur qui brille sans cesse dans le réduit de votre cœur. Plongez-vous y par la pratique d’une profonde et silencieuse méditation. Plongez à fond et nagez librement dans l’océan de « sat-chit-ânanda ».
Flottez sur le fleuve de la Joie divine. Puisez à la source. Dirigez-vous tout droit vers la fontaine de la Conscience divine et buvez-en le nectar. Éprouvez le frisson de l’Embrassement divin, de la divine Extase. Je dois vous quitter ici. Vous êtes parvenu à l’état d’immortalité, où meurt toute crainte.
O Prema ! sois sans peur. Brille, maintenant. Ta lumière est venue !
Pratiquez régulièrement et systématiquement la méditation, aux mêmes heures de la journée. Vous créerez facilement en vous l’état d’esprit qui convient.
Plus vous méditerez et plus vous jouirez d’une intense vie intérieure spirituelle, où les sens ni le mental ne joueront. Vous serez tout près de la source de l’Atman. Vous savourerez le flot de félicité et de paix.
Les objets des sens n’auront plus d’attraits, alors, pour vous. Le monde vous apparaîtra comme un long rêve. L’aube de la vraie connaissance (jnâna) luira en vous par une constante et profonde méditation. Vous serez pleinement illuminé. Le rideau de l’ignorance tombera, les voiles se déchireront ; l’idée de corps s’évanouira. Vous comprendrez le sens de la grande formule sacrée (mahâvâkya) : « TAT TVAM ASI » (cela tu L’es aussi).
Toutes les différences, distinctions et qualités disparaîtront. Vous ne verrez partout que l’unique et infini Atman, plein de béatitude, de lumière et de connaissance. Ce sera, en vérité, une expérience rare. N’en soyez pas effrayé comme le fut Arjuna ; soyez impavide. Vous serez alors laissé à vous-même, plus rien ne restant à voir ou à entendre. Les sens sont abolis, tout n’est plus que pure conscience.
Tu es l’Atman, ô Prema ! Tu n’es pas ce corps périssable. Détruis tes illusions (moha) au sujet de ce corps impur. Ne dis plus à l’avenir « mon corps », mais plutôt « cet instrument ». Voilà que le soleil se couche dans un rayonnement ; prends place pour la méditation. Plonge de nouveau dans le confluent, Triveni, de l’Atman.
Rassemble tous les rayons de ton mental et pénètre dans les plus intimes asiles de ton cœur. Abandonne toute crainte, tout souci, tout chagrin, toute angoisse. Repose dans l’océan silencieux et jouis de l’éternelle paix. Tu n’es plus une âme enchaînée à un corps ; toute limitation est abolie ; et si les vieux désirs, les vieilles exigences essayent de faire entendre leurs sifflements, détruis-les par la trique du discernement (viveka) et par l’épée du renoncement (vairâgya).
Que ces deux armes soient toujours avec toi aussi longtemps que tu n’es pas parvenu à la fixité dans le Brahman (Brahma-sthiti), entièrement établi dans l’Atman.
OM est Sat-Chit-Ananda, OM est l’Infini, l’Éternel
Chante OM, sens OM, fredonne OM, vis dans OM
Médite sur OM, crie OM OM OM
Entends OM, goûte OM, vois OM
Mange OM, bois OM
OM est ton nom
Que OM te guide
OM OM OM
OM Shantih